Naviguer dans l’incertitude : savons-nous encore utiliser notre boussole naturelle ?

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L’errance polaire de Mike Horn ces derniers jours s’inscrit dans une longue tradition d’exploration dont l’histoire a conservé la mémoire à travers des noms célèbres comme celui des norvégiens Roald Admunsen et Fridjof Nansen ou du capitaine américain George De Long, moins connu en Europe. Pourtant, entre 1879 et 1881, l’épopée de son bateau « la Jeannette » va défrayer la chronique. L’expédition est élaborée sur une erreur magistrale du géographe allemand August Petermann qui était convaincu de l’existence d’une mer polaire libre de glaces, et donc navigable, grâce à un courant tempéré, le Kuroshio, qui allait ouvrir une porte d’entrée vers le pôle Nord. La théorie de Petermann s'avère vite erronée et le navire de l'expédition est piégé par la glace avec trente-trois membres d'équipage : il va dériver pendant près de deux ans avant d'être broyé par la pression des glaces et couler au nord de la côte sibérienne. Le capitaine De Long conduit alors ses hommes dans une errance et une survie aux limites humaines sur la banquise. Au bout du voyage, De Long et vingt de ses compagnons vont trouver la mort mais quelques rescapés raconteront cette incroyable aventure (« Au royaume des Glaces », Hampton Sides, éditions Guerin-Paulsen, 2018).

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Quelques années plus tard, en 1893, Fridjof Nansen et Hjalmar Johansen vont réaliser la plus époustouflante des tentatives depuis leur navire, « le Fram », en parcourant à pied des centaines de kilomètres en autonomie pendant plus d’une année sur une banquise en dérive. La carte utilisée par Nansen est conservée au musée de Tromso en Norvège : sans repères visuels dans le mauvais temps souvent et sur une banquise en perpétuelle dérive, Nansen et son compagnon réussirent à garder le cap, nous donnant une leçon incroyable de navigation dans l’incertitude. Tristan Gooley a publié en 2010 the “Natural Compass”, livre qui raconte toutes les manières possibles utilisée depuis la nuit des temps par les hommes pour s’orienter. On y découvre les astuces des Inuits pour mesurer la force des courants, l’analyse des reflets et la phosphorescence des mers, les étoiles et la lune, les mythes, la toponymie et bien d’autres techniques...

L’observation de la Nature a servi de boussole aux peuples primitifs. Mais qu’avons-nous conservé de ces savoirs millénaires ? Le nez dans le GPS et les indicateurs de performances, les hommes ont perdu leurs aptitudes fondamentales à naviguer sans repères ni cartes. Et avec les transformations du Monde, l’incertitude et l’ambiguïté, l’imprévisibilité des phénomènes et la difficulté à élaborer les cartes du futur, les dirigeants devraient repenser les cartes du futur et s’interroger sur cette question de l’aptitude à la navigation.

 
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